Hier je vous parlais des prémices de mon accouchement, de ma préparation à la césarienne puisque le travail ne c’était pas mis en route tout seul, comme espéré…
[ Fin du suspens… Quoique… ]
Nous étions donc dans l’expectative du retour de notre messagère de sage femme. Quand allait-elle revenir? Qu’est-ce qu’elle pouvait bien faire? Qu’est-ce qui lui prenait autant de temps? Elle n’était censée que prévenir le bloc et revenir finir de me préparer pour y descendre.
Les minutes m’ont semblé des heures…
Je m’attendais à la voir revenir avec un brancard, sauf qu’elle est revenue avec un fauteuil roulant. Mais pourquoi s’est-elle ramenée avec un fauteuil roulant? Pour Zarico, j’étais pourtant descendue sur un lit? Je n’y comprenais plus grand chose.
Elle s’est alors arrêtée et m’a annoncée avec un grand sourire « Alors? On va en salle de naissance? ». Je n’ai pas réalisé de suite, je venais de prendre un revers du droit imaginaire et j’étais totalement sonnée. Elle s’est alors reprise et m’a expliqué qu’elle avait discuté avec l’équipe médicale de garde et qu’ils avaient donné leur accord pour que je tente d’accoucher par voies basses, et, que, si j’étais toujours partante, je pouvais rejoindre la salle de naissance « verte ». Un seul mot est sorti de ma bouche « OUI! ». Je ne pensais plus à rien, la tête totalement vide, alors que, quelques minutes plus tôt, j’étais chamboulée d’interrogations, d’angoisses et de regrets.
Finalement, peut être allais-je l’avoir mon accouchement tant rêvé. Je dis bien peut être. Je savais pertinemment que le travail allait être plus que surveillé, à cause de mon utérus cicatriciel, et que les conditions devraient être entièrement remplies pour que tu sortes naturellement. Mais je ne voulais pas y penser. J’étais focalisée sur toi, un grand sourire sur le visage alors que les contractions s’intensifiaient. Je m’en fichais, j’allais tout faire pour que tu viennes au monde le plus naturellement possible.
Je découvrais enfin une salle de naissance. J’étais émue au possissible, parce qu’en fait, je re-découvrais ce qu’était salle de naissance. Une salle de naissance pour un moment heureux, je l’espérais de toutes mes forces.
La dernière fois que nous en avions côtoyé une, c’était pour mon interruption médicale de grossesse. Le terme étant trop avancé, il avait fallu que j’accouche par voies basses. Je pense d’ailleurs, que le fait de vouloir accoucher naturellement ne vient pas uniquement de ma césarienne, il vient aussi de ce foutu « accouchement » ou « non-accouchement ». J’ai souffert, j’ai attendu, j’ai poussé, pour rien du tout. Nous avions vécu tous les côtés « négatifs » sans connaître de dénouement heureux.
Bref, nous y étions enfin, c’était le principal.
A 10h30, mon col était à 2. Les contractions s’intensifiaient mais restaient plutôt supportables. Niaise que j’étais, je me répétais, toute contente, que si c’était ça la douleur, ce serait largement gérable… J’ai très vite compris que j’avais parlé trop vite. Vers 11h30, la douleur était bien là et les contractions très rapprochées. Il était temps de me faire poser cette sacro-sainte péridurale.
Autant l’équipe médicale de garde a été super, attentionnée et à l’écoute, autant l’anesthésiste… On m’avait prévenu qu’ils étaient souvent particuliers, mais à ce point. Il est entré dans la pièce, sans un bonjour, sans rien expliquer. Il a fait son truc, et est parti comme il est venu, en claquant la porte. Pas un seul mot n’est sorti de sa bouche, à un seul moment. Elle était posée, c’était le principal après tout!
Toutes les demi-heures, notre sage-femme, Juliette, passait nous voir afin de surveiller l’avancée du travail. Il fallait qu’il avance régulièrement et qu’il ne dure pas trop longtemps sous peine de se rendre directement au bloc. Je crois que je n’oublierai jamais cette femme. Elle m’a été d’une aide précieuse, une personne douce et patiente, et surtout, avec beaucoup d’humour.
A chaque fois qu’elle passait, elle nous motivait et semblait convaincue que je l’aurai mon accouchement miracle, ce qui me rassurait surtout quand j’étais désemparée, voyant poindre la césarienne qui me pendait au bout du nez. A chaque passage, elle me donnait des heures butoirs où les étapes devraient être franchies.
A 14h30, mon col était bloqué à 3 depuis deux heures. On me laissait jusqu’à 16h30 pour que les choses évoluent, sinon il faudrait passer par la chirurgie. Je commençais à fatiguer un peu mais la douleurs étaient très bien apaisée grâce à la péridurale. Pour faire avancer un peu les choses, Juliette m’a proposé de me mettre un peu sur le côté, ce que j’ai accepté avec grand plaisir. Je n’aurai pas dû, la péridurale s’est mise à mal se répartir et les douleurs sont devenue totalement insoutenables. Ma jambe droite s’est retrouvée totalement paralysée et je ressentais toutes les contractions, un calvaire.
Après m’être remise sur le dos et augmenté quelques doses supplémentaires d’anesthésiant, tout est rentré dans l’ordre, sauf ma jambe qui était totalement endormie, pour le moment ça ne me faisait pas grand chose.
Lorsque 16h30 est arrivé, j’étais totalement stressée, peur que rien n’est bougé, peur d’avoir eu mal pour rien, peur d’avoir attendu pour rien, mais c’était sans compter sur toi ma petite Facétieuse… Après examen, mon col était en fait passé de 3 à 8.
Tous mes espoirs étaient revenus et plus motivée que jamais, je retrouvais mes couleurs, ce qui a beaucoup étonné les sages-femmes. J’étais ravie (et un peu maso aussi). Je commençais à la sentir pousser et même si la sensation n’était pas des plus agréable, ça signifiait que les choses avançaient, et c’était bien là le principal.
Vers 19h, mon col était à enfin à 10, à partir du moment où il serait totalement ouvert, on me laisserait deux heures pour accoucher, pas plus. A partir de ce moment là, les examens se sont rapprochés car il ne fallait pas que mon utérus soit « en danger ».
10 heures que nous étions en salle de naissance. Bizarrement, moi qui suis si impatiente dans la vie et qui ne supporte absolument pas d’attendre, je n’ai pas vu le temps passer. Cette attente ne m’a pas semblé si longue, j’étais tellement heureuse que rien n’aurait pu tarir ce moment, même mon plus vilain défaut. J’étais fatiguée, oui, mais je gardais le sourire.
A 20h15, mon col était enfin à dilatation complète et tu commençais à t’engager sérieusement. Pour accélérer un peu les choses, les sages-femmes m’ont installée dans les étriers, sauf que ma jambe droite, encore totalement paralysée, n’y tenait pas. Elles ont alors pris la décision de couper la péridurale pour que je retrouve possession de ce corps mort et surtout pour ne pas que je me blesse si jamais elle venait à tomber de son pied d’estale.
A partir de ce moment, il me restait 2 heures, 2 petites heures. Plus d’autres choix, sinon ce serait césarienne en urgence, encore et toujours… Il fallait que tu descendes à tout prix.
20h30, 20h45, 21h15, rien, tu ne descendais pas.
A 21h30, les nouvelles n’étaient pas bonnes du tout. Tu étais bel et bien engagée mais tu n’avançais toujours pas. Il nous restait une demi-heure, un toute petite demi-heure pour que tu te décides, sans quoi tout ce travail n’aura servi à rien. Pour le coup, tout mon optimisme a été balayé en un tour de main. C’était sûr, nous avions fait tout ça pour rien… 13 heures de travail pour un dénouement chirurgical, j’étais dépitée. Les larmes coulaient toutes seules, sans que je ne puisse les retenir, tous mes espoirs s’effondraient au fur et à mesure que les minutes s’écoulaient.
Et, pourtant…
A 21h50, une douleur intense m’a décrochée de ma déception grandissante. Il fallait que je pousse, je ne pouvais plus me retenir. Après avoir appelé la sage-femme, j’avais du mal à me contenir. Tout s’est enchaîné à 10 minutes de l’heure fatidique, tu t’es décidée à descendre. Tu nous auras décidément tout fait!
Finalement, j’allais accouchée par voies basses avec ton papa à mes côtés. J’allais vivre cet accouchement que j’avais tant imaginé, tant rêvé, tant espéré. Nous allions vivre la naissance de notre enfant, ensemble, l’un à côté de l’autre. Nous allions ressentir cette invasion d’amour inexplicable, ensemble, en même temps. Bientôt, tu serais là, et nous te découvririons ensemble.
C’est tout ça aussi que je voulais vivre. Vivre ce moment, le plus beau d’une vie avec l’homme que j’aime, me sentir soutenue, me sentir aimée et surtout protégée. Il a rempli son rôle à merveille, quoiqu’il en dise. Lui, s’est senti impuissant et inutile, mais non, il a été la personne la plus importante pour moi ce jour-là. J’étais bien parce qu’il était là, à mes côtés.
Sa main contre ma nuque j’entamais donc ces fameuses poussées endiablée. La douleur était tenace, la fatigue m’envahissait, à ce moment là, je maudissais cette foutue jambe, je n’étais plus si sûr d’y arriver. Vers 22h15, tu étais bloquée, il a donc fallu t’aider un peu. Le gynécologue de garde, à la carrure digne d’un pilier du XV de France, t’a fait sortir en un tour de main, ou plutôt de forceps. J’ai senti chaque partie de ton corps sortir du mien. J’ai eu mal, vraiment mal, je n’ai jamais eu aussi mal, mais, bien que je ne voulais pas y croire avant ça, toute ces douleurs ont totalement été oubliée quand je t’ai aperçue.
22h22, le 02/02/2016, toi, notre deuxième bébé, notre fille, tu as enfin montré le bout de ton nez, avec 5 jours de retard, 13 heures de travail. Toi qui devait arriver la veille par césarienne programmée, toi qui n’était pas vraiment prévue au programme mais qui aura su se faire tant attendre, tu m’a offert l’un des plus beau cadeau du monde, l’un des plus beaux moments de ma vie.
Si tu savais comme j’ai pleuré quand j’ai entendu ton premier cri, quand on a déposé ton petit corps tout chaud sur le mien, quand je t’ai serré si fort dans mes bras, quand j’ai noyé mon regard dans le tien puis dans celui de ton papa, quand il t’a embrassé et qu’il t’a pris dans ses bras. Pas besoin de mots, d’ailleurs peu de mots sont sortis de nos bouches à cet instant. Ce fut si intense, si fort, qu’aucun mot ne pourrait décrire ce moment.
Toi, ma toute petite, toi qui nous auras surpris jusqu’au bout, tu auras soigné mes blessures, tu m’auras permise de vivre ce que j’ai toujours voulu vivre.